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Situation en Géorgie

Proposition de résolution des Verts/ALE

Déposée par Daniel Cohn-Bendit, Monica Frassoni, Marie Anne Isler Béguin, Cem Özdemir, Angelika Beer, Raül Romeva i Rueda et Bart Staes
au nom du groupe Verts/ALE

Le Parlement européen,

– vu ses résolutions antérieures sur la Géorgie, en particulier celles du 29 novembre 2007 et du 5 juin 2008,

– vu sa résolution du 17 janvier 2008 sur une politique de l'UE pour le Caucase du Sud plus efficace et sa résolution du 15 novembre 2007 sur le renforcement de la politique européenne de voisinage (PEV),

– vu l'accord de partenariat et de coopération entre les Communautés européennes et leurs États membres, d'une part, et la Géorgie, d'autre part, entré en vigueur le 1er juillet 1999,

– vu le plan d'action de la PEV approuvé par le Conseil de coopération UE-Géorgie le 14 novembre 2006,

– vu la résolution du Conseil de sécurité des Nations unies du 15 avril 2008 qui défend l'intégrité territoriale de la Géorgie et prolonge le mandat de la mission d'observation des Nations unies en Géorgie (MONUG) jusqu'au 15 octobre 2008,

– vu les conclusions de la réunion extraordinaire du Conseil "Affaires générales et Relations extérieures", le 13 août 2008, à Bruxelles,

– vu les conclusions de la réunion extraordinaire du Conseil européen, le 1er septembre 2008, à Bruxelles,

– vu l'article 103, paragraphe 2, de son règlement,vu l'article 103, paragraphe 2, de son règlement,

A. rappelant qu'après plusieurs semaines de tension accrue et d'accrochage entre les parties et des provocations de la part des forces séparatistes de l'Ossétie du Sud, avec des attentats à la bombe, des heurts meurtriers, des échanges de tirs et des arrosages à l'aveugle, qui ont provoqué la mort de nombreux civils et en ont blessé encore davantage, l'armée géorgienne a lancé, dans la nuit du 7 au 8 août, une attaque surprise d'artillerie sur Tskhinvali, puis une opération au sol, utilisant à la fois des chars et l'infanterie, dans le but de reprendre le contrôle de l'Ossétie du Sud,

B. observant que la Russie a immédiatement déversé ses troupes en Géorgie, par le tunnel de Roki, et repris le contrôle de la région de Tskhinvali, puis qu'elle a envahi et occupé de larges pans du territoire géorgien en visant délibérément et détruisant les infrastructures civiles à valeur stratégique,

C. considérant que les villages géorgiens d'Ossétie du Sud, ainsi que ceux des régions proches de la ligne de démarcation, ont été gravement endommagés, pillés et volontairement incendiés par les forces irrégulières ossètes, sans que les troupes russes fassent grand chose pour s'y opposer,

D. considérant que, le 12 août 2008, les autorités de Géorgie et de Russie ont signé l'accord de cessez?le?feu proposé par la présidence de l'Union européenne et fondé sur les six principes suivants: (1) ne pas recourir à la force; (2) cesser les hostilités de façon définitive; (3) donner libre accès à l'aide humanitaire; (4) retrait des forces militaires géorgiennes vers leur lieu habituel de cantonnement; (5) retrait des forces militaires russes sur les lignes antérieures au déclenchement des hostilités; dans l'attente d'un mécanisme international, les forces de paix russes mettront en oeuvre des mesures additionnelles de sécurité; (6) ouverture de discussions internationales sur les modalités de sécurité et de stabilité en Abkhazie et en Ossétie du Sud,

E. considérant comme indispensable que la pleine application de ces principes soit dûment surveillée par une mission de l'OSCE suffisamment dotée en personnel,

F. observant que les ministres des affaires étrangères de l'OTAN, lors de leur réunion du 19 août 2008, ont convenu d'apporter leur soutien à la Géorgie, dans un certain nombre de domaines, et décidé que les relations avec la Russie ne pouvaient poursuivre un cours normal; constatant que la Russie a réagi en décidant de suspendre sa coopération avec l'OTAN,

G. considérant que cette crise a coupé environ 158 000 personnes de leurs racines, que ces personnes ont été contraintes de quitter leur foyer et qu'elles doivent désormais être aidées dans leurs efforts de retour; considérant que la présence d'engins non explosés, de bombes à sous-munitions et de mines terrestres, ainsi que les avertissements russes et l'absence de coopération, rend périlleux un tel retour,

H. rappelant que la Russie a prétendu que la Géorgie commettait un génocide à Tskhinvali; que, de leur côté, les Géorgiens ont accusé Russes et Ossètes d'ourdir une campagne de purification ethnique,

I. considérant que les experts des organisations internationales de défense des droits de l'homme et les analystes militaires ont documenté l'usage par les troupes russes de bombes à sous-munitions en Géorgie, ce qui a laissé des milliers d'engins non explosés sur les zones de conflit; que, selon Human Rights Watch, la Géorgie a aussi admis avoir fait usage de ce type de munition en Ossétie du Sud, près du tunnel de Roki,

J. considérant que le président Medvedev a signé le 26 août 2008 les décrets proclamant la reconnaissance par la Fédération de Russie de l'indépendance, à la fois, de l'Ossétie du Sud et de l'Abkhazie, après que le Conseil de la Fédération et la Douma eurent adopté à l'unanimité une résolution en ce sens; considérant qu'en avril 2008, Vladimir Poutine, alors Président de la Russie, a chargé des ministres de son gouvernement et des agences d'État d'établir des liens officiels avec des agences homologues dans les républiques géorgiennes séparatistes d'Abkhazie et d'Ossétie du Sud,

K. considérant que la Fédération de Russie est sur le point de signer un accord militaire avec l'Ossétie du Sud qui autoriserait la Russie à installer une base militaire dans la province irrédentiste; considérant, selon des sources diplomatiques, que la Russie envisage aussi d'installer deux bases militaires en Abkhazie,

L. observant que, la semaine dernière, le gouvernement de Géorgie a rompu les relations diplomatiques avec la Russie et qu'en réponse, la Fédération de Russie a fait de même,

M. considérant que la Géorgie est étroitement lié à l'Union européenne, en jouant un rôle actif dans la politique européenne de voisinage, et qu'au fil des ans, l'Union européenne et la Fédération de Russie ont développé un partenariat stratégique,

N. considérant comme irréversible la profonde interdépendance de la Russie et de l'Union européenne et leur intégration économique; considérant que l'Union européenne et la Russie ont une responsabilité partagée pour la stabilité et la sécurité mondiale et qu'une coopération renforcée et des relations de bon voisinage sont particulièrement importantes pour la stabilité et la sécurité de l'Europe,

O. estimant que la forte dépendance des États membres à l'égard du pétrole et du gaz russes les empêchent souvent l'Union européenne de parler d'une seule voix et d'adopter une approche plus cohérente et assurée vis-à-vis de ce pays, en vue de défendre et promouvoir les valeurs fondatrices de l'Union européenne, que sont la démocratie, le respect des droits de l'homme et l'état de droit,

P. considérant que l'Union européenne devrait tout faire pour aider la Géorgie à poursuivre sur la voie des réformes et à élaborer une démocratie pleinement efficiente; considérant que le plan d'action de la PEV offre à la Géorgie l'occasion de nouer de plus proches relations avec l'UE et d'adopter et de partager ses valeurs fondatrices,

1. accueille favorablement les conclusions de la réunion extraordinaire du Conseil européen du 1er septembre 2008;

2. est d'avis qu'aucune solution militaire ne peut résoudre les conflits au Caucase et déplore toutes celles qui s'appuient sur la force et la violence afin de modifier la situation sur le terrain en Ossétie du Sud et en Abkhazie;

3. critique fermement, à cet égard, l'attaque par les forces géorgiennes dans la région de Tskhinvali et condamne avec force la réponse militaire russe, qui était disproportionnée et incompatible avec le mandat international de maintien de la paix que les troupes russes étaient chargées d'accomplir dans la région;

4. regrette que, ces dernières années, l'UE ait tardé à manifester son engagement dans le Caucase du Sud, ce qui a pu passer pour une acceptation tacite du statu quo dans les conflits gelés; salue, à ce propos, les constants efforts de la présidence en exercice de l'UE en vue de mettre fin aux combats et de résoudre la crise actuelle; soutient l'accord de cessez?le?feu proposé à la Géorgie et à la Russie mais souligne qu'il doit être considéré comme le point de départ d'un véritable processus de paix visant à atteindre un règlement complet et durable;

5. exhorte toutes les parties à respecter et pleinement mettre en oeuvre les six principes inscrits dans l'accord de cessez?le?feu du 12 août 2008; déplore, à ce propos, l'incomplète mise en oeuvre de l'accord par les forces russes et demande le retrait complet des troupes russes hors des parties du territoire géorgien qui se situent au-delà des zones de sécurité entourant l'Ossétie du Sud et l'Abkhazie, en particulier hors des environs de Poti et de la zone entre Gori et l'Ossétie du Sud;

6. salue la décision de l'OSCE, le 19 août 2008, d'accroître pour six mois, de vingt à cent, le nombre de ses observateurs militaires afin de contribuer à la pleine mise en oeuvre des six principes de l'accord de cessez?le?feu mais estime cela insuffisant par rapport à la situation actuelle; plaide pour que la mission soit convenablement dotée en personnel; exhorte les États membres à contribuer activement à la mise en place de la mission; demande à l'OSCE d'ouvrir une enquête indépendante et impartiale sur les évènements qui se sont produits pendant la crise;

7. réaffirme son plein soutien à l'indépendance et à l'intégrité territoriale de la Géorgie et demande aux autorités russes de respecter pleinement la souveraineté de ce pays dans les limites des frontières internationalement reconnues; rejette, à cet égard, les décrets présidentiels proclamant la reconnaissance par la Russie de l'indépendance de l'Ossétie du Sud et de l'Abkhazie et avertit le président Medvedev des conséquences qu'un tel acte risque d'avoir dans l'ensemble de la région et au sein de la Fédération de Russie elle-même; fait remarquer que toute décision sur le statut définitif de l'Ossétie du Sud et de l'Abkhazie doit être subordonnée au respect des principes fondamentaux du droit international, notamment en ce qui concerne le retour des réfugiés et le respect de leurs biens, ainsi que les garanties offertes aux minorités et le respect de leurs droits;

8. est d'avis que le cadre actuel pour le maintien de la paix doit être radicalement revu puisque les forces russes se sont écartées définitivement de leur rôle de gardiens neutres et impartiaux de la paix; demande, à ce propos, à la Fédération de Russie de ne plus faire obstacle à une résolution du conseil de sécurité de l'ONU visant à mieux définir les principes et les termes des accords de cessez?le?feu du 12 août 2008 et d'accepter, éventuellement, le déploiement d'une force internationale de maintien de la paix mandatée par l'ONU dans les zones faisant l'objet de conflit ou affectées par la guerre;

9. réitère son appel à une participation européenne accrue dans les conflits gelés, afin de faire progresser le processus de paix; invite le Conseil et la Commission à préparer et lancer, dans le cadre de la politique européenne de sécurité et de défense, un mission en Géorgie, avec une forte composante civile, en vue de protéger la population civile et de stabiliser la situation, de soutenir les institutions démocratiques en Géorgie, d'accélérer le rythme des réformes, de coordonner les projets de reconstruction dans les régions affectées par la guerre et de rétablir la confiance entre les parties;

10. salue la décision de la Commission, le 22 août 2008, d'attribuer une aide humanitaire supplémentaire de 5 millions d'euros aux personnes vulnérables touchées par le conflit entre la Géorgie et la Fédération de Russie; invite la Commission à tirer le meilleur parti de l'expérience acquise par l'Agence européenne pour la reconstruction dans les Balkans occidentaux et à commencer un programme de reconstruction d'urgence dans toutes les régions en conflit afin de faciliter le retour des réfugiés et déplacés; l'invite à s'assurer que l'aide parvient à la population de Géorgie, y compris aux habitants de l'Ossétie du Sud, afin de les aider à faire face à la grave situation humanitaire;

11. déplore que les postes russes de contrôle au nord de Gori soient un obstacle aux tentatives d'aide humanitaire et qu'ils aient un effet néfaste sur l'économie de la région, notamment sur les échanges commerciaux avec l'Arménie, et invite toutes les parties à garantir un passage sûr et sans limites à l'aide humanitaire et à consentir aux journalistes et aux observateurs indépendants un accès libre;

12. exhorte la Géorgie, qui a ratifié le statut de Rome de la Cour pénale internationale, et les autorités russes à accorder leur soutien au bureau du procureur de la Cour pénale internationale et à pleinement coopérer avec lui dans son enquête sur les événements tragiques et les attaques de civils qui ont eu lieu durant le conflit, afin de déterminer les responsabilités et d'inculper les personnes responsables;

13. invite les autorités russes et géorgiennes à donner toute l'information sur les zones où leurs armées ont lâché des bombes à sous-munitions afin de débuter immédiatement les opérations de déminage, d'éviter d'autres atteintes de civils innocents et de faciliter le sûr retour des personnes déplacées;

14. rappelle que ce conflit a causé des dommages très graves à l'écosystème naturel géorgien; déplore l'incendie des forêts du parc naturel national de Borjomi-Karagauli par l'aviation russe et condamne le refus du commandement militaire russe d'ouvrir les corridors aériens pour éteindre les feux dans ces zones montagneuses;

15. invite le Conseil à nommer un envoyé spécial de haut rang en Géorgie afin de suivre étroitement l'évolution de la crise et la mise en oeuvre de l'accord de cessez?le?feu, de faciliter la reprise du dialogue entre les parties, de désamorcer les tensions et de rétablir la confiance mutuelle;

16. invite les pays membres de l'OSCE à appuyer la nomination par son président en exercice d'un représentant spécial chargé de surveiller le respect du droit international humanitaire et d'en rendre compte;

17. demande au Conseil d'organiser, sous l'égide des Nations unies, une conférence internationale, engageant toutes les parties intéressées, afin de débattre et définir une procédure normalisée en vue de dégager une solution complète et durable à tous les conflits gelés dans le Caucase et en Moldavie;

18. exprime sa profonde inquiétude devant la détérioration des relations entre l'UE et la Russie pendant la crise en cours et invite toutes les parties à agir de manière responsable et à tout faire pour éviter le début d'une nouvelle guerre froide; pense que rien ne peut remplacer un dialogue franc et sincère et la coopération au sein d'un voisinage commun fondé sur des valeurs partagées; souligne, néanmoins, qu'il faudrait, si les autorités russes ne se conformaient pas aux engagements pris le 12 août 2008, revoir de fond en comble le partenariat actuel avec la Russie; remarque, à ce propos, que la poursuite des négociations sur un nouvel accord de coopération et de partenariat entre l'UE et la Russie doit être subordonnée au respect et à la mise en oeuvre par la Russie de tous les points de l'accord de cessez?le?feu;

19. invite les États membres à prendre l'initiative d'évoquer, devant le Conseil de l'Europe, la question du respect par la Russie de l'accord de cessez?le?feu, afin de suspendre la participation de la Russie à cette organisation si l'accord n'est pas pleinement mis en oeuvre;

20. invite instamment la Commission et les États membres à ouvrir dès que possible des négociations sur les accords de réadmission et de facilitation de la délivrance de visas entre l'UE et la Géorgie, afin de garantir que les citoyens géorgiens ne soient pas lésés par rapport aux titulaires de passeports russes dans les régions séparatistes d'Abkhazie et d'Ossétie du Sud;

21. plaide pour le développement d'un partenariat privilégié avec la Géorgie et l'Ukraine;

22. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission et aux États membres, au Président et au parlement de Géorgie, à l'ONU, à l'OSCE, au Conseil de l'Europe ainsi qu'au Président et au parlement de la Fédération de Russie.

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