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Politique commune dans le domaine d'immigration

Proposition de résolution des Verts/ALE

déposée

par Hiltrud Breyer, Monica Frassoni, Sepp Kusstatscher, Jean Lambert et Raül Romeva i Rueda,
au nom du groupe Verts/ALE

Le Parlement européen,

– vu l'article 6 du traité UE et l'article 63 du traité CE,

– vu l'article 42 du traité UE,

– vu l'article 67 du traité UE,

– vu les conclusions des Conseils européens réunis à Tampere les 15 et 16 octobre 1999, à Laeken les 14 et 15 décembre 2001, à Séville les 21 et 22 juin 2002 et à Thessalonique les 19 et 20 juin 2003,

– vu les programmes relatifs à l'espace de liberté, de sécurité et de justice adoptés à Tampere en 1999 et à la Haye en 2004,

– vu la session que le Conseil JAI a tenue à Tampere du 20 au 22 septembre 2006,

– vu les discussions en cours au sujet des perspectives financières, notamment sur le Fonds européen d'intégration, le Fonds européen pour les réfugiés et le Fonds européen pour le retour,

– vu le rapport rédigé par le Fonds des Nations unies pour la population sur l'état de la population mondiale en 2006 sous le titre "Vers l'espoir - les femmes et la migration internationale",

– vu la directive 2004/81/CE du Conseil du 29 avril 2004 relative au titre de séjour délivré aux ressortissants de pays tiers qui sont victimes de la traite des êtres humains ou ont fait l'objet d'une aide à l'immigration clandestine et qui coopèrent avec les autorités compétentes,

– vu l'article 103, paragraphe 2, de son règlement,

A. considérant que l'Union européenne ne dispose pas, sept ans après l'adoption du programme de Tampere, d'une politique cohérente de l'immigration, et notamment n'a toujours pas mis en oeuvre une politique raisonnée du développement, ainsi qu'une politique dans les domaines de la migration légale et du retour,

B. considérant que l'article 42 du traité UE prévoit une clause de passerelle permettant d'appliquer la procédure de codécision et que l'article 67, paragraphe 2, du traité CE autorise le vote à la majorité qualifiée au Conseil dans les matières relevant du troisième pilier,

C. considérant que la Commission a adopté une communication sur le thème Migration et développement, mais n'est pas parvenue à obtenir auprès du Conseil le soutien nécessaire à sa démarche,

D. considérant que la Conférence ministérielle euro-africaine sur la migration et le développement, réunie à Rabat les 10 et 11 juillet 2006, a adopté une déclaration et un plan d'action,

E. considérant que l'immigration résulte des disparités économiques, de l'accentuation de l'écart entre les pays riches et les pays pauvres, des guerres ayant pour objectif la maîtrise des ressources naturelles, de persécutions politiques et de la dégradation de l'environnement,

F. considérant que la politique d'immigration actuellement conduite par l'UE et les États membres afin de réduire les flux migratoires ne se traduit aucunement par une baisse de ces flux, mais contribue bien plutôt à rendre la situation des migrants plus précaire sans atteindre les objectifs déclarés,

G. considérant que le nombre des femmes immigrantes ne cesse de croître dans l'UE, au point que celles-ci représentent 54 % environ de l'effectif total des migrants et relèvent de catégories de plus en plus variées (migration économique, regroupement familial, réfugiés, immigration clandestine, demande d'asile),

H. considérant que les immigrantes sont fréquemment confrontées à de lourdes discriminations en ce que leur situation dépend du statut légal de leur conjoint, de même que sous l'effet des mentalités ainsi que des stéréotypes et des pratiques négatifs qui ont cours dans la société d'accueil; relevant, en outre, qu'elles connaissent, dans certaines sociétés, de graves problèmes tels que les mariages forcés, les crimes d'honneur et les mutilations génitales,

I. considérant que les violations des droits humains que subissent les femmes et les jeunes filles immigrantes sous la forme de crimes d'honneur, de mariages forcés, de mutilations génitales et autres atteintes ne sauraient être justifiées par des motifs culturels ou religieux et ne doivent en aucun cas être tolérées,

1. souligne avec force que les États membres de l'UE doivent remplir les obligations qui leur incombent à l'égard des migrants en vertu des législations nationales et du droit international;

2. mesure les difficultés qu'éprouvent plusieurs États membres de l'UE, notamment Malte, l'Italie et l'Espagne, dans la gestion des flux migratoires de ces dernières années;

3. estime que le partage des responsabilités et des charges financières entre les États membres doit faire partie intégrante de la politique commune de l'Union européenne dans le domaine de l'immigration;

4. demande que l'Union européenne joue un plus grand rôle dans la gestion des urgences humanitaires en rapport avec les flux migratoires et les demandes d'asile;

5. estime, par conséquent, que les pays concernés doivent pouvoir bénéficier de l'assistance technique et des moyens financiers qu'offrent le programme ARGO, le Fonds européen pour les réfugiés, le Fonds européen pour les frontières extérieures, le Fonds européen d'intégration et le Fonds européen pour le retour au titre de la période 2007-2013;

6. demande que des crédits supplémentaires soient mis à la disposition des ONG qui fournissent sur le terrain une indispensable aide d'urgence;

7. juge nécessaire de conduire dans les pays d'origine et les pays de transit de véritables campagnes d'information sur les moyens d'obtenir un emploi et d'accéder à l'éducation; demande, par ailleurs, que s'engagent des négociations avec les pays d'origine ou de transit en sorte qu'ils contribuent activement à la gestion des flux migratoires, étant entendu que les accords conclus ne doivent pas exonérer l'Union européenne de son devoir de défendre et de protéger les droits humains;

8. invite la Commission à proposer dans les plus brefs délais la constitution d'un fonds d'urgence destiné à financer la mise en place d'équipes de soutien spécialisées ayant pour mission de fournir une assistance concrète lors de l'accueil des migrants aux frontières et dans la solution des crises humanitaires que connaissent les États membres, ainsi qu'à introduire dans les nouveaux fonds couverts par la période 2007-2013 un mécanisme permettant de dégager des aides financières pour les situations d'urgence;

9. demande que soit élaborée une politique commune de l'immigration qui n'opère aucune distinction selon le pays d'origine ou le niveau de qualification des migrants;

10. déplore que le Conseil ne soit toujours pas parvenu, cinq ans après le Conseil européen de Tampere et malgré les nombreuses demandes formulées par le Parlement, à définir une politique commune de l'immigration en recourant à l'article 42 du traité UE, dit article passerelle, pour transférer le dossier du troisième vers le premier pilier; regrette que, comme le rapporte l'édition du 22 septembre 2006 de l'Agence Europe, la République tchèque, l'Irlande, l'Allemagne, la Pologne, Malte et Chypre demeurent hostiles à l'application de cette procédure;

11. estime qu'une politique européenne cohérente dans le domaine de l'immigration ne peut réussir qu'en association avec une politique d'intégration assurant l'insertion des migrants sur le marché du travail, l'accès aux établissements d'enseignement, aux services sociaux et sanitaires, ainsi que les moyens de participer à la vie sociale, culturelle et politique;

12. est d'avis que les contrôles aux frontières et la lutte contre l'immigration clandestine ne peuvent constituer qu'un des aspects de la politique de l'UE envers les pays tiers, à l'égard desquels il importe de mener une active politique de développement visant à réduire les effets dommageables de l'émigration;

13. réaffirme la nécessité de mettre en oeuvre une politique communautaire de l'immigration reposant sur l'ouverture de canaux d'immigration légale et sur la définition de normes communes aux fins de la protection des droits fondamentaux des immigrants sur tout le territoire de l'Union, telles qu'elles ont été définies par le Conseil européen réuni à Tampere en 1999 et confirmées dans le programme de la Haye;

14. fait observer que les institutions économiques mondiales, en privilégiant la concurrence entre des partenaires inégaux et des politiques illustrées par les programmes d'ajustement structurel, la privatisation d'entreprises publiques et la libéralisation des marchés imposée par les pays riches et les institutions financières internationales, ont en fait aggravé la pauvreté en Afrique;

15. estime que l'immigration massive est le résultat de la défaillance des systèmes économiques, d'un appauvrissement des populations, de violations des droits humains, de la dégradation de l'environnement, de l'accentuation de l'écart entre les pays riches et les pays pauvres, des guerres civiles, des guerres conduites pour la maîtrise des ressources naturelles, des persécutions politiques, de l'instabilité politique, de la corruption et des dictatures que connaissent de nombreux pays d'origine;

16. demande que les États membres de l'UE et la Commission européenne s'engagent plus fermement à modifier les politiques actuelles, notamment la vente au rabais de produits européens sur les marchés du tiers monde, afin de permettre aux pays africains, asiatiques et latino-américains de protéger ou de construire leur économie et d'assurer à leur population des revenus décents, seule solution pour réduire les flux d'immigration clandestine;

17. souligne qu'une stratégie d'ensemble envers l'immigration doit viser en premier lieu les facteurs d'incitation au départ qui conduisent des personnes à quitter leur pays, ce qui suppose d'élaborer des plans précis en faveur du développement et des investissements dans les pays d'origine ou de transit, ainsi que d'ouvrir de réelles possibilités d'immigration légale vers l'Union européenne ("carte verte" de l'UE);

18. souligne que les mesures destinées à lutter contre l'immigration clandestine et à renforcer les contrôles aux frontières extérieures doivent respecter, même si elles sont appliquées en coopération avec les pays tiers, les garanties et les droits fondamentaux de la personne énoncés dans la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et dans la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, notamment le droit d'asile et le droit au non-refoulement;

19. demande au Conseil, à la Commission et aux États membres de prendre des dispositions pour que les femmes et les jeunes filles immigrantes, et particulièrement les victimes d'actes de violence physique ou psychologique tels que les mariages forcés ou arrangés, toujours pratiqués, se voient octroyer un permis de séjour et de prendre toutes les mesures administratives nécessaires pour les protéger, y compris sous la forme d'un accès effectif aux mécanismes d'assistance et protection;

20. demande au Conseil, à la Commission et aux États membres de prendre toutes les initiatives qui s'imposent afin de protéger les droits des femmes et des jeunes filles immigrantes, ainsi que de lutter contre les discriminations qu'elles subissent dans leur communauté d'origine, en rejetant toutes les formes de relativisme culturel ou religieux de nature à violer les droits fondamentaux des femmes;

21. prie instamment le Conseil de recourir d'urgence aux clauses de passerelle figurant à l'article 42 du traité UE et à l'article 67, paragraphe 2, du traité CE, sachant que l'application de la procédure de codécision et le vote à la majorité qualifiée faciliteraient la recherche d'une solution à l'impasse législative actuelle;

22. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission ainsi qu'aux gouvernements et aux parlements des États membres.

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